lundi 19 novembre 2012

il va falloir s'y habituer

Le 2 juillet dernier je me lamentais ici même d'avoir réussi une des plus formidables séries de photos inexploitables de ma carrière. J'avais promis d'expliquer pourquoi je n'étais  pas vraiment dans mon assiette au moment de déclencher et pourquoi ça me semblait alors une bonne excuse.

C'était exactement la toute dernière fois que je voyais la maison de famille, acquise par mes parents il y a quelques dizaines d'années à restaurer du sol au plafond et devenue depuis l'incontournable rendez-vous pluri-annuel comme on le voit parfois dans les films (en moins agité quand-même, on n'est que deux enfants concernés !).

Bien-sûr cette maison n'était pas issue d'une longue tradition, héritée de génération en génération et abritant des centaines d'objets légués par mes ancêtres - ceux-là même dont j'ai tant de mal à retrouver la trace avant 1850 au fond de leur Morvan natal. Elle n'avait de valeur à mes yeux que parce qu'elle a accompagné une grande partie de mon enfance et les débuts de mes propres rejetons. Et qu'elle représentait une sorte de havre, un endroit un peu retiré du monde, au calme ressourçant avec le tic-tac de sa pendule et parfois le passage d'un tracteur.

tic-tac-tic-tac...

Les années passant l'endroit s'est finalement révélé trop grand et trop dur à entretenir pour mes parents vieillissants et décision fut prise, dans la douleur, de la vendre pour s'installer en ville...

C'était donc la toute dernière fois. J'ai tellement de mal à réaliser que ça s'est produit que je ne veux surtout pas retourner sur les lieux. Je préfère garder mes souvenirs intacts.

il va bien falloir s'y habituer

Et comme pour bien marquer ce changement, dès l'installation en ville que j'évoquais, c'est le moment que le corps de mon père a choisi pour annoncer qu'il n'en pouvait plus. Il a quand-même tenu bon pendant quelques semaines : c'est qu'il fallait tout installer dans le nouvel appartement, tout organiser... jusqu'à ce qu'on réalise que ce qu'il organisait, ce n'était pas sa nouvelle vie.

Non, ce qu'il organisait, c'était notre vie à nous. Sans lui.


Ça fait un mois pile que mon papa est mort.
Dit là comme ça, ça paraît tellement dérisoire. C'est juste que ça fait encore un peu mal, et qu'il va falloir s'y habituer.




11 commentaires:

Anonyme a dit…

En pensée...
Juste là...

E. (fait semblant de conserver un peu d'anonymat !) a dit…

Il est au moins là !..

Les Piroud a dit…

Magnifique maison et superbes souvenirs dedans, j'en suis sûre :)
Grosse pensée pour toi et toutes nos condoléances pour ton papa, on ne savait pas.

Olivier a dit…

Au delà de l'intention louable et généreuse, vouloir organiser la vie des autres est probablement une entreprise "un peu" vaine... qui aura eu pour effet de priver en partie l’intéressé d'une fin de vie sereine et apaisée avec ses proches.

Anonyme a dit…

Il faudra beaucoup de temps pour supporter la douleur et ce manque d'absence..... surtout ne pas oublier les bons moments qui peuvent rendre le sourire parfois pendant quelques secondes et qui font du bien!!!

E. (fait semblant de conserver un peu d'anonymat !) a dit…

Il était comme ça. Une volonté d'indépendance et d'autonomie qui confinait à l'obsession presque. C'est aussi loin que je me souvienne ce qu'il s'est toujours évertué à nous apprendre. Il s'y est tellement bien consacré qu'il avait même jusqu'à récemment oublié les souvenirs de sa propre construction...
Oui il aurait pu profiter de ces derniers mois, et nous avec, mais la maladie l'a probablement privé de cette sérénité. Les choses se sont passées comme ça, on n'y changera rien et ce n'est pas ce que je retiendrai.
J'ai perdu mon phare dans la nuit. Il me manque. Simplement il me faudra un moment pour réaliser que je navigue déjà très bien tout seul, en grande partie grâce à lui.

Olivier a dit…

Certes, ce n'est pas le plus intéressant à retenir. Sauf à tenter soi-même un travail de préparation de son propre départ. Et comme dirait l'autre : "on n'en est peut-être pas encore là...
Car il reste quelques encablures à parcourir ! Et à défaut de phare pour indiquer la direction, il est toujours possible d'emporter avec nous un peu de cette flamme pour éclairer le chemin, de nous y réchauffer à l'occasion, et surtout de la porter aussi loin que possible, afin qu'elle devienne à son tour le phare de ceux qui nous suivent.
N'est-ce pas ça, le chemin de la vie, de nos vies ?

Unknown a dit…

tu as fait déjà fait un grand chemin avec ta petite famille (enfin plutôt grande quand meme )
et pour t'éclairer rassure toi il restera toujours les gens qui t'aiment , et qui te connaissent depuis trés trés longtemps et qui seront toujours là
quoiqu'il arrive.
une grosse pensée pour vous pour les fêtes de fin d'année

E. (fait semblant de conserver un peu d'anonymat !) a dit…

Heureusement qu'il reste du monde ;-)

J'en profite pour encourager les lecteurs à profiter de toutes les ressources touristiques qu'offre le Pays de Retz. Allez-y, c'est un coin sympa et c'est plein de gens bien !!!

Unknown a dit…

je n'avais pas vu cet article-là

le début m'a rappelé mon propre cas lorsque mes parents ont quitté leur commerce,

et la fin m'a attristée, parce que je ne l'avais pas vu avant, et je veux juste te dire à quel point je suis navrée

E. (fait semblant de conserver un peu d'anonymat !) a dit…

Arf, on espère toujours passer à travers... alors que c'est bien le seul truc dont on peut être sûr que ça arrivera..!
A propos de tes parents, je jette toujours un oeil quand je passe devant leur boutique (aujourd'hui encore, j'habite à 2 pas)... comme si le rideau allait remonter et l'activité reprendre comme avant. Certaines habitudes ont la vie dure !